NUMERO n°166 - Page 1 - Granville, France Birthplace of Monsieur Christian Dior LieudenaissancedeMonsieurChristianDior Ont collaboré à ce numéro : Frederic AUERBACH, Andrew AYERS, Chloé BADAWY, Algirdas BAKAS, François BERTHOUD, Koto BOLOFO, Constance BRETON, Bruno CARLEN, Dario CATELLANI, Liz COLLINS, Jessica CRAIG-MARTIN, Fernando DAMASCENO, Rebecca DE VOLKOVITCH, Juliette DELAFONTAINE, Stéphane FEUGÈRE, Stéphane GALLOIS, Nathaniel GOLDBERG, Sophie HOUDRÉ, Olivier JOYARD, Greg KADEL, Billy KIDD, Clara LE FORT, Elliot LEWIS, Clément LOMELLINI, Anthony MAULE, Toby MCFARLAN POND, Raquel MEDINA-CLEGHORN, Derek MEDWED, MÉLANIE&RAMON, Yves MIRANDE, Jean-Baptiste MONDINO, Guido MOCAFICO, Bill MULLEN, Roberto PATELLA, Sean J. ROSE, Heji SHIN, Hedi SLIMANE, Jessica STRELEC, Elizabeth SULCER, Camille-Joséphine TEISSEIRE, Nicolas TREMBLEY, Éric TRONCY, Laurence VÉLY, Txema YESTE Publicité Lagardère Publicité : 10, rue Thierry-Le-Luron, 92300 Levallois-Perret Constance BENQUE présidente Caroline POIS-BOISSON directrice générale adjointe, tél. : 0141348311, caroline.pois@lagardere-pub.com Emmanuel LALA directeur commercial, tél. : 01413483 95, emmanuel.lala@lagardere-pub.com Frédérique CHALMETON directrice de la publicité, tél. : 0141348223, frederique.chalmeton@lagardere-pub.com Gunes AKDORA directrice de clientèle, tél. : 0141348624, gunes.akdora@lagardere-pub.com Clémence JOCKEY directrice de clientèle, tél. : 0141348498, clemence.jockey@lagardere-pub.com Julie GOYHENECHE assistante de publicité, tél. : 0141348370, julie.goyheneche@lagardere-pub.com Correspondant italien : JB MEDIA (Milan), Jeffrey BYRNES, tél. : +390229013427, jeffrey@jbmedia.com Relation abonnés/Vente anciens numéros Par téléphone : 0344624353 par courrier : Everial CRM, B1315 60643 Chantilly Cedex Tarif France métropolitaine : 49 € (1 an pour 10 numéros) Abonnez-vous en ligne ou commandez d’anciens numéros sur www.numero.com ou numeroabo@everial.com Distribution France Presstalis Ventes (dépositaires et diffuseurs exclusivement), tél. : 0156889805 Distribution à l’étranger : Export Press Réglages réseau : À Juste Titres Imprimerie : Druckhaus Kaufmann, Raiffeisenstr. 29 D - 77933 Lahr (Allemagne) Numéro est édité par Numéro Presse SAS (40109,34 €) Siège : 5, rue du Cirque, Paris VIIIe . RCS Paris B 418 680 054. Durée de la société : 99 ans. Tous droits de reproduction réservés. Numéro CPPAP : 0720 K 78678. ISSN 1292-6213. Dépôt légal à parution. Éditions internationales Numéro Tokyo : Fusosha Publishing Inc., directeur de la publication : Keiichi Murakami. Numéro Allemagne : Madame Verlag GmbH, directeur de la publication : Christian Medweth Numéro Chine : Modern Media Co., Ltd., directeurs de la publication : Thomas Shao et Alain Deroche. Numéro Russie : Artcom Media Group, directrice de la publication : Gala Gladkikh. Numéro Thaïlande : Fond Publishing International Co., Ltd, directrice de la publication : Amornsiri Boonyasit. 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La façon dont il utilise la lumière du jour est devenue sa signature. Auteur de la première couverture de Numéro avec Kate Moss, il a également réalisé nombre de campagnes publicitaires. Dans cette édition, il signe une très belle série couture, la nuit, dans Paris (p. 190), avec la ravissante Daria Strokous, également en couverture. Aux antipodes du glamour et de la haute couture, le talentueux photographe se passionne aujourd’hui pour une équipe d’ostéopathes et les enfants qu’ils soignent à Barcelone, sur lesquels il prépare un livre. 78 DR Guest list Guido Mocafico photographe Maître incontestable de la nature morte, Guido Mocafico est l’une des signatures iconiques de Numéro depuis sa création. Pour mettre en scène les parfums dans cette édition, le grand photographe s’est allié avec un ami de toujours, le non moins célèbre illustrateur François Berthoud, en imaginant une série de posters en trompe-l’œil (p. 296). Avant son exposition à la Galerie Hamiltons de Londres en 2016, Guido Mocafico s’apprête à célébrer sa longue collaboration avec le magazine Numéro à travers un beau livre qui paraîtra aux éditions Steidl avant la fin de l’année. Anthony Maule photographe Très inspiré par le thème “dark” de ce Numéro, Anthony Maule signe la série “Ombres portées” (p. 236). “J’étais très enthousiaste à l’idée de réaliser ce projet, car l’obscurité m’évoque quelque chose de familier. J’ai voulu dépeindre des personnages énigmatiques, telles les femmes mystérieuses que l’on croise dans le monde de la nuit.” Anthony Maule a collaboré aux magazines Interview et Dazed and Confused. Récemment, il a réalisé la dernière campagne de la maison Max Mara et partage sa vie entre Londres et New York. 82 DR Liz Collins photographe Collaborant depuis ses débuts avec Numéro, Liz Collins, native de Birmingham, a étudié la photographie auprès de l’emblématique Martin Parr. Dans cette édition, elle signe le portrait de Sarah Burton, la directrice artistique de la maison Alexander McQueen (p. 106). C’est par le biais d’amis communs que les deux Britanniques avaient eu l’occasion de se rencontrer, un peu plus tôt, cette année. “Sarah m’inspire énormément. Poursuivre l’œuvre de Lee McQueen comme elle le fait aujourd’hui est le gage d’une fidélité exemplaire à sa mémoire”, confie la photographe. Bakas Algirdas photographe Bakas Algirdas vit à Shanghai. Après avoir réalisé différents éditoriaux et campagnes de publicité en Lituanie, il se consacre à des travaux en Chine et dans le reste de l’Asie. Il a été publié par le New York Times et le magazine Wallpaper*. Pour ce Numéro, il a photographié Christian de Portzamparc et Pierre Hermé à Séoul, devant la nouvelle boutique Dior au design époustouflant (p. 160). Chaque année, il parcourt un nouveau pays à moto, qu’il découvre à travers son objectif. Sa prochaine destination sera le Népal, où il se rendra pour venir en aide aux survivants du tremblement de terre. 84 Guest list 166 Édito Babeth “C’est le soleil qui fait l’ombre”, m’a dit un jour Peter Lindbergh lors d’un shooting, depuis devenu iconique, dans le désert de Palm Springs. Nul mieux que ce maître de la photographie n’a su déceler la beauté lumineuse des femmes dans cette part de leur sensibilité qu’elles préfèrent souvent cacher dans l’ombre. C’est cette même dualité que l’on retrouve dans les créations de Sarah Burton pour la maison Alexander McQueen. Sans pour autant renier l’œuvre de son illustre prédécesseur, cette dernière a su insuffler une douceur et une grâce féminine dans le répertoire sombre de la marque. De même, Hedi Slimane braque les projecteurs sur l’underground de la scène musicale française, sans le dénaturer, révélant toute sa fièvre et son authenticité. Figure publique de la mode, l’immense Karl Lagerfeld n’en reste pas moins l’une des plus secrètes. Dans nos pages, le couturier se révèle au fil d’anecdotes croustillantes. À notre époque où le moindre détail de nos vies privées est exposé sur les réseaux sociaux, le meilleur moyen de préserver sa part de mystère est de se cacher en pleine lumière. Par Thibaut Wychowanok, portraits Hedi Slimane Nouvelle vague Moodoïd, Melody’s Echo Chamber, La Femme, Frànçois and the Atlas Mountains… Photographiés, immortalisés par Hedi Slimane, ces quatre groupes forment une vague musicale française éclectique et captivante. Récit de leurs aventures flamboyantes. Sacré numéro Ces quatre groupes constituent une déferlante musicale comme on en a rarement vu. Certes, il y en a d’autres (Grand Blanc, The Pirouettes, etc.), mais ce sont sans doute ceux qui surfent sur ses hauteurs avec le plus de panache, d’énergie et de liberté. Aux yeux de beau coup, ils incarnent une nouvelle scène française, émergente depuis cinq ans. Il est vrai que leurs points communs – audelà des amitiés qui les lient – sont légion. “Nous sommes tous très jeunes, entre 20 et 30 ans”, acquiesce Marlon Magnée, l’un des deux membres fondateurs de La Femme. “Nous n’hésitons pas à chanter en français, sans nous interdire l’anglais pour certains d’entre nous, et n’avons pas honte de nos références françaises, des sixties jusqu’à aujourd’hui. Nous partageons sans doute également un son synthwave, très présent. Notre musique est presque toujours marquée par l’usage de synthétiseurs analogiques. Ils ont une tonalité eighties issue de la new wave qui est revenue en force au milieu des années 2000…” Mais formentils une “scène” pour autant ? “Pour qu’il y ait scène, à mon sens, il faut un lieu fédérateur, des attitudes communes, une manière de s’habiller similaire, souligne Marlon Magnée. On a connu cela, à Paris, avec les jeunes groupes de rock qui se retrouvaient au Gibus dans les années 2000, ou avec Ed Banger dans l’électro, mais nous, nous en sommes loin.” En effet, ici, c’est plutôt l’éclectisme qui prévaut. Et les histoires singulières. Pablo Padovani de Moodoïd. 88 Pablo Padovani, en août 2013, est le premier surpris du succès de son nouveau projet, Moodoïd. Son morceau Je suis la montagne, connaît d’abord un écho positif sur Internet. Le premier EP dont il fait partie est produit par Kevin Parker, de Tame Impala, groupe néopsyché déjà connu à l’époque et qui est aujourd’hui vénéré pour son album Currents (sorti en juillet 2015). Moodoïd est placé sur orbite. “Mais ma musique a trop rapidement été étiquetée ‘psyché’, regrette Pablo Padovani. Alors j’ai immédiatement décidé de me lancer dans la composition d’un album qui étonnerait par son foisonnement créatif.” Le résultat est au rendezvous : un catalogue réjouissant d’images surréalistes, burlesques et absurdes. “C’est vrai que j’aime associer des choses rigolotes. Parfois, c’est juste une idée impulsivement jetée dans un carnet, comme un homme qui se fait écraser par un marteau. J’adore le non-sens”, concède le jeune artiste. Deux semaines d’écriture, trois semaines d’enregistrement et deux mois d’affinement ont suffi pour faire naître Le Monde Möö, un album joyeu sement foutraque. La pop française s’y voit dynamitée, entre visions psychédéliques, références françaises et balades langoureuses dans des univers baroques et colorés. “Mon père était musicien de jazz, très ouvert à la musique du monde. J’ai gardé cette énergie de l’improvisation et cette ouverture d’esprit en termes de son et de composition”, conclut le musicien. François Marry, leader de Frànçois and the Atlas Mountains, a déjà sorti plusieurs disques depuis qu’il a quitté sa Charente Maritime pour Bristol en 2003. Mais c’est en signant avec le prestigieux label anglais Domino (Franz Ferdinand, Arctic Monkeys, Hot Chip) pour l’album E Volo Love (2012) que le projet de cet autodidacte prend son envol. S’ensuit le fabuleux Piano Ombre en 2014. En anglais comme en français, la voix douce de François Marry ouvre le dernier album sur une belle proposition : “Soyons les plus… soyons les plus beaux.” Frànçois and the Atlas Mountains s’y tient. La musique est soi gnée. Les pépites pop s’y multiplient avec délicatesse et romantisme, toujours enlevées. Intenses. “Pendant longtemps, j’ai assouvi mon plaisir de faire une musique intimiste, presque confidentielle, confie François Marry. J’enregistrais avec peu de moyens, ce qui renforçait l’aspect fragile de ma musique, un aspect que j’ai poussé jusqu’à son paroxysme. Puis j’ai eu envie de davantage de rythme et de force. Les autres membres du groupe m’y ont aidé.” Marlon Magnée a créé La Femme avec Sacha Got alors qu’il n’avait que 18 ans. Si le garçon en a aujourd’hui 24, c’est toujours en skateboard qu’il se rend à ses rendezvous. “Je me suis longtemps senti comme un gosse de 18 ans, mais je commence à m’adapter”, s’amusetil. L’adaptation au succès n’est pas toujours évidente pour François Marry de Frànçois and the Atlas Mountains. Sacré numéro 90 une bande de gamins bordéliques et borderline à l’occasion. “Sacha et moi sommes tous les deux originaires de Biarritz. Lorsqu’il m’a rejoint à Paris après le bac, je suis allé voir ma bande de potes et je leur ai dit : ‘Qui est prêt à tout abandonner pour faire de la musique?’ Ceux qui nous ont suivis ont formé La Femme. J’avais pris conscience qu’il existait une place pour un vrai groupe de rock en France, et que nous en avions le potentiel.” Avec l’album Psycho Tropical Berlin en 2013, c’est le grand tourbillon des références qui l’emporte : new wave, punk, krautrock, électro, surf music, musique française des années 60, de Dutronc à Gainsbourg. L’énergie est folle. Impossible de ne pas danser, au moins de ne pas gigoter pour les plus coincés. Malgré le fatras d’influences, les garçons, qui composent à deux – chacun de son côté puis ensemble –, ont réussi l’exploit de définir un son La Femme. Un bordel où toutes les demoiselles sont admises, du moment qu’elles se tiennent mal. Et s’il y a une femme incontournable au sein de cette génération, c’est bien Melody Prochet. Après douze ans de conservatoire à proximité d’AixenProvence, la jeune femme d’aujourd’hui 28 ans rejette le classique et “monte à Paris” à 18 ans. Alors qu’elle vient de sortir son premier disque, elle se rend par hasard au concert d’un groupe australien… Tame Impala. C’est le coup de foudre. Avec la musique autant qu’avec Kevin Parker, leader du groupe. S’ensuit un départ avec lui dans la ville de Perth, en Australie, et un nouvel album signé sous le nom de Melody’s Echo Chamber. Un album très cohérent, centré sur une idée et un genre, le “psyché animiste” (à la Tame Impala, bien sûr). “On dit que Perth est la ville la plus isolée du monde, confie la musicienne. J’y ai vu une chance de m’ouvrir à des possibilités infinies, à l’image des espaces infinis qui nous entouraient. Nous étions libres. Nous vivions dans une maison peuplée de gens créatifs qui se baladaient pieds nus et passaient leur temps à picoler et à fumer. On pouvait se permettre de consacrer une heure à la musique, puis de passer le reste de la journée à la plage.” C’est une épiphanie. “Kevin a évidemment influencé ma musique et ma manière de créer. J’avais tendance à théoriser, à réaliser des harmonies très compliquées en raison de mes bases classiques. Kevin m’a aidée à m’en libérer, à acquérir une légèreté.” Aujourd’hui, Melody Prochet s’apprête à passer un “second cap d’épanouissement”. “J’ai loué une maison au fin fond de la Normandie pour composer le second album avec mon groupe, dont Pablo, de Moodoïd, qui est mon guitariste depuis le début. C’est une expérience. Je veux voir ce que nous serons capables de faire au milieu des champs dans cette maison magnifique. Je crois que c’est la meilleure manière de perpétuer le projet de manière fluide, en communauté.” Marlon Magnée de La Femme. Sacré numéro 92 À défaut de former une scène totalement homogène, ces quatre groupes partagent l’esprit d’une génération libre, à l’énergie vitale dionysiaque, prête à briser les catégories et à traverser les frontières, géographiques ou musicales. Rarement l’esprit de groupe ou de “communauté” aura été aussi fort dans le discours des artistes fran çais. Même si le projet de Moodoïd était avant tout celui de Pablo Padovani, sur scène, le musicien choisit de s’entourer uniquement de femmes. “Moins parce qu’elles étaient des musiciennes professionnelles, assuretil, que parce qu’elles étaient des amies ou pouvaient réellement faire groupe à mes côtés.” La générosité et la vitalité de la musique de cette génération doit beaucoup à cette caractéristique, si peu commune au pays des grandes figures solitaires (au moins en apparence) à la Bashung, Dominique A, Brel, etc. S’il est incontestable aujourd’hui, leur succès est pourtant presque toujours venu d’abord de l’étranger, comme s’il fallait encore la validation du monde anglosaxon pour que la France ouvre les portes à ses nouveaux talents. La leçon Air, Phoenix et Daft Punk n’a pas porté. Si François Marry s’est épa noui à Bristol, Melody Prochet est signée sur un label américain et le groupe La Femme s’est enfin vu courtisé par les salles parisiennes après une tournée californienne payée grâce à des petits boulots… Car cette génération n’a pas de temps à perdre, ni peur du risque ou de foutre en l’air le système. Une génération libre. “J’écrirai mon deuxième album à mon rythme, confie Melody Prochet. Je ne céderai pas aux sirènes du succès.” La Femme continuera sa stratégie libertaire malgré une signature chez un important label : “Nous avons signé avec Barclay parce que, quitte à signer, autant le faire avec une structure qui pourra nous soutenir. Mais nous faisons toujours en sorte d’être autosuffisants. Nous enregistrons le second album dans notre cave, tout en profitant d’un véritable studio quand cela se révèle nécessaire.” En novembre 2014, dans le cadre du Saint Laurent Music Project Paris Session I, Hedi Slimane réalise leur portrait. En réalité, le photographe les a invités, dans le plus grand secret, en Californie. Certains se connaissent, des amis se retrouvent, des groupes qui ne faisaient que se croiser se parlent enfin. Des amitiés se créent, d’autres se renforcent, au bord de la piscine. Pour eux, celui qui est aussi le directeur de création de Saint Laurent Paris imagine déjà, depuis plusieurs saisons, un vestiaire qui leur va à ravir. Il leur a offert, ici, en Californie, un lieu où se rassembler pour un instant. Peutêtre que, à ce moment précis, cette génération n’était pas très loin de former une scène… Melody Prochet de Melody’s Echo Chamber. Sacré numéro 94 • RETROUVEZ LES INTERVIEWS DE PABLO PADOVANI, DE FRANÇOIS MARRY, DE MARLON MAGNÉE ET DE MELODY PROCHET EN INTÉGRALITÉ SUR NUMERO.COM
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